Caractère
du cheval arabe ...... Lorsque le
Bédouin célèbre sa jument avec une éloquence
poétique et romanesque, le profane pense le plus
souvent qu'il s'agit d'une exagération. Et
pourtant l'Arabe croit juste d'apprécier à sa
valeur la fidélité d'une compagne à qui le lie
une confiance inébranlable. Pour lui, son
origine est divine; à cette superstition
s'ajoute une reconnaissance profonde. Tous deux,
homme et cheval ont à affronter ensemble une
existence pénible. Leur union est donc une
nécessité vitale.
...... Le Bédouin et
sa jument ont comme une âme commune. Qu'il le
sache ou non, tout homme croit en lui-même : la
foi que l'habitant du désert a en sa personne
s'étend à sa jument. Il la bénit comme il prie
pour lui et pour sa tribu puisque son bien
dépend du bien de tous. L'amour profond qu'il
ressent pour elle naît de sa fierté d'avoir
créé un tel cheval, mieux encore : d'avoir pu
préserver une forme aussi pure grâce à une
sélection de tous les instants. Car la valeur de
sa jument repose uniquement sur la pureté de son
sang : seule cette pureté garantit sa santé et
sa force, sa rusticité en matière de fourrage
et de soin, la longueur de sa vie, sa longue
fécondité, sa vitesse et son endurance, son
pouvoir de régénération après un effort ou
une période d'épreuves et les qualités
psychiques qui découlent d'un système nerveux
sans tare. En effet, sa rapidité de réaction
exprime une énergie et une intelligence
supérieures, la faculté de comprendre
rapidement une situation et d'agir en
conséquence. Tout dépend donc de sa force
nerveuse et de sa sensibilité. Sa douceur et
l'agrément de son caractère sont l'expression
d'une réelle harmonie entre son corps et son
esprit. C'est de là que vient la réputation
qu'a l'arabe d'être le cheval parfait, et c'est
la clé de sa grâce et de sa beauté. Néanmoins
le Bédouin célèbre aussi le courage de sa
jument, soit par ignorance soit par modestie, ou
peut-être parce que ces deux sentiments n'en
font qu'un : car il est évident que c'est le
cavalier armé de sa seule lance qui jette sa
jument à la poursuite des loups; quant à elle,
elle ne témoigne à son maître qu'une extrême
obéissance, un extrême confiance peut-être.
...... Quelle épreuve
monstrueuse pour les nerfs d'un animal qui n'est
qu'une proie, comme le cheval, que de forcer à
la course le loup, carnassier qu'il redoute.
C'est une situation contraire à sa nature, à sa
"mémoire héréditaire". Là, l'homme
assume avec énergie toute la responsabilité en
imposant au cheval une obéissance absolue et en
le soumettant à sa volonté pendant toute la
durée de la chasse. La vie sauvage est dure et
exige souvent que tous deux aillent jusqu'au bout
de leurs forces. C'est donc le Bédouin qui
mérite cette réputation de courage, et non le
cheval. Ce dernier remplit d'ailleurs toute sa
tâche en surmontant patiemment sa propre nature
: de la part de sa bonne petite jument l'homme ne
peut vraiment rien exiger de plus que cette
confiance absolue dans des situations contraires.
...... Aussi concevons
nous parfaitement la reconnaissance que le
Bédouin ressent à son égard, et il est naturel
qu'il la chante et la célèbre. Sa confiance est
fondée, sa fierté justifiée, de même que sa
poésie qui plonge ses racines dans les
profondeurs d'un mode de vie élémentaire.
...... Léleveur le plus
consciencieux possède l'animal le plus fidèle,
car plus sa monture est de sang pur, plus se
manifeste l'harmonie de son caractère. C'est là
le secret au sujet duquel l'Occident se pose tant
de questions. Dans les ouvrages de psychologie
animale, on lit que le cheval arabe s'adapte à
tous les dressages parce que le Bédouin lui fait
partager sa vie, si bien qu'il arrive à
dépendre de plus en plus de l'homme, lequel
intervient à tous les instants de son existence.
Mais ce sont là des facteurs individuels, nés
du milieu, nous dirions du destin s'il s'agissait
des hommes, et qui n'ont rien d'héréditaire. Ce
qui l'est, c'est l'équilibre incomparable du
caractère, l'élévation de l'intelligence et
une santé inaltérable. Ce sont ces éléments
qui donnent à l'homme la possibilité de renouer
avec chaque nouvelle génération de chevaux les
liens qu'il a eus avec les précédentes depuis
les temps les plus anciens. Tout le monde sait
que l'homme forme son cheval, physiquement et
psychiquement, et que l'animal devient le reflet
de son éducateur. L'éleveur occidental de
chevaux arabes qui apprécie cette docilité et
cette harmonie de caractère doit s'efforcer de
faire couvrir ses juments par un étalon au sang
pur s'il désire obtenir des chevaux parfaits:
qu'il ne s'écarte jamais de ce que les éleveurs
arabes, ces "fanatiques" ont trouvé
bon de poser pour règle fondamentale. Ces
génies de l'élevage connaissent la valeur de la
pureté des formes et c'est à elle qu'ils
confient leur vie dans le désert.
suite
caractère et comportement p1
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