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Après la représentation
des chevaux de Pihiri, la plus ancienne est
celle des chevaux du tombeau de Rekhmara dont il
sera question plus loin puis celle des chevaux
attelés au char de guerre d'Amenhotep IV ou
Aménophis IV, de la XVIIIe dynastie, à Tell-el-Amarna.*
Les grands tableaux
militaires où étaient représentés les chars
des armées des Thoutmès et des Aménophis de la
XVIIIe dynastie ne sont connus que par des
inscriptions qui en donnent l'explication et qui
ont seules échappé à la destruction; mais les
récits et les tableaux des campagnes des Ramsès
de la XIXe et de la XXe dynastie ont été
conservés (Voyez les planches des ouvrages suivants: Description
de l'Egypte; Champollion, Monuments de l'Egypte
et de la Nubie; Prisse d'Avennes, Monuments
égyptiens; Lepsius, Denkmaeler
aus Egypten und Æthiopien,
etc...); et,
Prisse d'Avennes
l'a déjà fait observer dans son mémoire
précité, ces tableaux
"nous
représentent des scènes militaires où
les chevaux et les chars de guerre jouent
le rôle principal et déterminent des
changements notables dans la tactique
militaire des Egyptiens." |
Le rôle considérable
joué par les chevaux sous le nouvel Empire et l'affection
dont ils étaient l'objet sont signalés dans une
foule de récits, notamment dans le poème de
Pentaour,
" l'une des
oeuvres les plus considérables et les
mieux inspirées de la littérature
égyptienne". |
Dans ce poème, Pentaour
raconte la campagne de l'an V de Ramsès II, le
Sésostris des Grecs, en glorifiant surtout la
conduite héroïque du Pharaon la veille de la
bataille de Kadesh, sur l'Oronte.
Ramsès était tombé dans une embuscade du
prince des Khétas. Abandonné d'une partie des
siens, il charge lui-même à la tête de sa
maison militaire, il soutient le choc de 2500
chars ennemis et les fait six fois reculer. Enfin
son armée arrive vers le soir et le dégage; il
rassemble ses généraux et les accable de
reproches.
" Que dira la
terre entière, lorsqu'elle apprendra que
vous m'avez laissé seul et sans second ?
que pas un prince, pas un officier de
chars ou d'archers n'a joint sa main à
la mienne? J'ai combattu, j'ai repoussé
des millions de peuples, à moi seul. Victoire
à Thèbes et Noura satisfaite
étaient mes grands chevaux; c'est ceux
que j'ai trouvés sous ma main quand j'étais
seul au milieu des ennemis frémissants.
Je leur ferai prendre moi-même leur
nourriture devant moi, chaque jour, quand
je serai dans mon palais, car je les ai
trouvés quand j'étais au milieu des
ennemis, avec le chef Menna, mon écuyer,
et avec les officiers de
ma maison qui m'accompagnaient et sont
mes témoins pour le combat: voilà ceux
que j'ai trouvés. Je suis revenu après
une lutte victorieuse, et j'ai frappé de
mon glaive les multitudes assemblées." (Maspéro, Hist.
anc. ,p.230-231.) |
*
L'usage de la cavalerie
proprement dite n'ayant été établi que bien
après le temps des Hyksos dans les contrées du
sud-ouest de l'Asie d'où ils étaient partis
pour envahir l'Egypte - (Voyez plus haut, pages
404 et 405) on conçoit que ces conquérants n'aient
point transmis cet usage aux Egyptiens.
C'est ce que Prisse d'Avennes
avait déjà constaté dans le mémoire précité.
" Le
témoignage unanime des tableaux
militaires, peints ou sculptés à
diverses époques sur les monuments de la
vallée du Nil, prouve qu'il n'y eut pas
en Egypte de cavalerie proprement dite...
On a bien remarqué, dans deux ou trois
bas-reliefs historiques, un homme monté
sur un cheval lancé au galop. Mais, dans
un de ces tableaux, le cavalier, monté
à poil, est un courrier portant une
dépêche qu'il tient dans la main. Dans
l'autre scène, les cavaliers sont des
étrangers, des ennemis; l'un est un
fuyard cherchant son salut dans la
vitesse d'un cheval désharnaché, sur
lequel il s'est jeté à l'imprévu; l'autre
cavalier, traversé par une flèche que
son bouclier n'a pu parer, essaie encore
de fuir sur un cheval lancé à toute
jambes." |
On trouvera les scènes
décrites par Prisse d'Avennes et d'autres
analogues dans les planches 17 bis, 21,22,300,329
et 439 des Monuments de l'Egypte et de la Nubie
de Champollion, qui dit dans l'explication de la
planche 439:
" Bas-relief
détaché d'un monument inconnu;
plusieurs hommes transportent à dos une
longue pièce de bois; un cavalier, sujet
rare dans les monuments égyptiens, les
précède." |
Quelques textes
hiéroglyphiques parlent aussi d'hommes à cheval
chez les étrangers. Le plus ancien est celui d'une
stèle très mutilée de Karnak. Amenhotep II ou
Aménophis II, de la XVIIIe dynastie, y raconte
ses campagnes en Syrie, et il dit:
" Sa Majesté
s'avança pour examiner le pays d'Anato,
et comme Sa Majesté faisait cela,
quelques Asiatiques vinrent à cheval."
( renseignement
oral de M. Maspéro) |
Aussi M.
Chabas a-t-il pu dire à la page
446 de ses Etudes sur l'antiquité historique:
" Les Khétas,
qui, à l'époque de leur prédominance
dans l'Asie occidentale avaient dans
leurs armées des corps très nombreux,
employaient aussi des cavaliers armés et
non armés. " |
Il montre même, à l'appui
de ce dernier fait des cavaliers khétas copiés
sur les tableaux des campagnes de Séti Ier et de
son fils Ramsès II, de la XIXe dynastie.
Plus tard, lors de la révolte des troupes
égyptiennes, Amasis ou Ahmès II, le chef des
rebelles, était à cheval lorsqu'il reçut d'une
manière fort incongrue l'envoyé d'Apriès (Hérodote,
II, 172).
Enfin, à la suite de nombreuses recherches sur
la question, M. Chabas est arrivé à cette
conclusion, qui est la vraie :
" Les armées
égyptiennes ne comprenaient pas de corps
de cavalerie proprement dite; mais
certains officiers étaient montés sur
des chevaux pour remplir un service qu'on
peut comparer à celui des officiers d'ordonnance
de nos généraux;" (Chabas, Etudes
sur l'antiq. hist. p. 423) |
et aussi, pouvons-nous
ajouter, pour faire le service d'éclaireurs.
M. Chabas
dit en outre:
" Les armées
des peuples d'Asie ne paraissent pas
avoir eu de corps de cavalerie. De même
que chez les Egyptiens elles ne
comprenaient que des chars. On y voit
cependant aussi, comme chez les Egyptiens,
quelques cavaliers armés d'arcs et de
boucliers (Chabas,
Etudes sur l'antiq. hist, p. 444). |
Ce jugement ne peut s'appliquer,
bien entendu, qu'aux peuples de Syrie et d'Assyrie
contemporains des premières dynasties du Nouvel
Empire égyptien;
car on a vu dans le chap.IV, § 2 et 3, que les
Iraniens et les Hindous ont très anciennement
possédé de la cavalerie proprement dite, et
dans le chap. VII que les Assyriens et les
Syriens, notamment ceux du pays d'Hamath, en
avaient aussi dès le temps de Sardanapale III et
de Sargon.
On voit, d'après ce qui précède, que Diodore
(I,54) s'est écarté de la
vérité en donnant à Sésostris, qu'il nomme
Sésoôsis " (Le nom de
Sésostris et Serôsis est tiré d'un des noms
populaires de Ramsès II, Sestou-râ ou Sessou-râ."
(Maspéro, Hist. anc. p 22, note2), une armée de
"600 000
fantassins, 24000 cavaliers et 27 000
chars de guerre." |
Homère
est au contraire resté dans la vraisemblance
historique quand il a fait dire à Achille
refusant les présents d'Agamemnon:
"Ses dons me
sont odieux, et lui, je le méprise comme
un Carien.
Dût-il m'offrir dix fois, vingt fois
autant de richesses qu'il en a ou en aura
un jour, autant qu'il en arrive dans
Orchomène ou dans Thèbes d'Egypte, dont
les palais en sont remplis, dont les cent
portes s'ouvrent pour laissser sortir
chacune deux cents guerriers avec leurs
chevaux et leurs chars; dût-il m'offrir
autant de joyaux précieux qu'il y a de
grains de sable et de poussière, jamais
Agamemnon ne me fléchira, qu'il n'ait
jusqu'au bout expié son intolérable
outrage. " (Iliade, IX, p.125.) |
La comparaison de ces deux
passages suffirait presque à elle seule pour
montrer que l'usage de la cavalerie proprement
dite s'établit en Egypte entre l'époque d'Homère
et celle de Diodore, probablement sous Psamétik
Ier, qui, monté sur le trône en l'an 627,
essaya de changer l'organisation sociale de l'Egypte
en attirant une foule de Syriens, de Cariens et
de Grecs parmi lesquels il choisit sa milice d'honneur
pour remplacer celle des Maschouasch. (Voyez
Maspéro, Hist anc p 490,493)
*
L'établissement
relativement récent de la cavalerie proprement
dite en Egypte n'a pas empêché la Bible de lui
en donner dès l'époque de Moïse; et, dans son
mémoire précité, Prisse d'Avennes
a essayé de justifier la Bible par les
considérations suivantes.
" Cette
mention de la cavalerie égyptienne,
fréquemment répétée dans la Bible, n'infirme
cependant pas l'autorité des monuments.
En recourant aux textes originaux, on
trouve plutôt mentionnés les chevaux et
les chariots de Pharaon que des cavaliers
et de la cavalerie proprement dite.
Rosellini (Monumenti civili, t.III) a
très bien discuté ce point de critique
historique et prouvé que le mot hébreu
qu'emploie Moïse ou l'auteur de la
narration n'exprime nullement des chevaux
montés par des cavaliers, mais seulement
des chevaux harnachés, ce qui doit s'entendre
par des chevaux préparés pour les chars
et aussi des chevaux de rechange.
Avec cette modification dans la
signification des mots, la tradition
historique n'est plus contredite par les
monuments qui, soit antérieurs, soit
postérieurs à Moïse, rendent
constamment le même témoignage contre l'existence
de la cavalerie proprement dite dans l'armée
égyptienne.
" Du reste, les textes
hiéroglyphiques retracent par des signes
ce que le langage copte traduit par
tentathôré, mot à mot chevaux
combattants, les soldats montés sur des
chars (Voy. Salvolini, Campagne de
Ramsès contre les Schéta, p 73).
Dans le dénombrement de l'armée de
Schéta (Scytho-Bactriens), sur une des
murailles du palais de Karnac, il est dit
que cette armée s'élevait à deux mille
cinq cent soixante chevaux, évidemment
pour désigner un pareil nombre d'hommes
montés sur des chars de guerre, puisqu'on
ne remarque aucun cavalier dans ce
tableau. Le texe hébreu de la Bible et
les légendes hiéroglyphiques des bas-reliefs
militaires se servent, comme on le voit,
des mêmes expressions." |
Mais on verra dans le
chapitre X que si l'expression parachîm de l'Exode
peut être justifiée par les considérations de
Prisse d'Avennes, il n'en est pas ainsi de l'expression
sôus ouéroukhbou du même livre.
*
Les chars de guerre des
monuments sont généralement attelés de deux
chevaux ; on remarque seulement quelques chars
attelés de quatre chevaux de front parmi ceux
des Pharaons, mais ce sont des chars de parade ou
de triomphe.
Les monuments représentent au moins aussi
souvent des étalons que des juments dans les
attelages de guerre. Toutefois on a vu que les
grands chevaux de Ramsès II signalés par
Pentaour éaient des juments, avaient des noms
féminins; et, dans le Papyrus Anastasi III,
écrit sous Ramsès II, le scribe Amenemapt dit
au scibe Penbesa :
" Quand te
sera apporté cet écrit de communication,
applique toi à devenir scribe; tu
primeras tout le monde. Arrive que je te
dise les devoirs fatigants de l'officier
de chars....
Après qu'on l'a dressé, il part pour
choisir un attelage dans les écuries de
Sa Majesté, vie, santé, force; à peine a-t-il
pris les bonnes cavales, il se réjouit
à grand bruit. Pour arriver avec elles
à son bourg, il se met au galop, mais n'est
bon qu'à galoper sur un bâton" (Maspéro, Hist.
anc., p. 268) |
Piétrement 1882
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