Pureté
du sang ...... Dans l'élevage
des chevaux arabes, on a malheureusement
négligé le fait le plus important, la pureté
exclusive du sang. A l'exception de quelques
éleveurs "fanatiques", on a croisé
les différentes sous-races sans prendre garde
aux particularités de leur type, car on a cru
que toutes représentaient un seul type
général. Certes, beaucoup de chevaux ont du
sang arabe - syriens, égyptiens, turcs,
berbères, irakiens, perses, turkmènes - et ce
sont des animaux élégants , vifs, nobles,
d'aspect (surtout lorsqu'on les compare aux
chevaux de nos pays du Nord); leur tenue, la
beauté de leur ligne prouve l'aristocratie de
leur origine. On reconnait toutefois le
véritable arabe à sa structure, à son
.individualité bien marquée, aux détails de la
tête, à la plus ou moins grande longueur du
cou, du dos, de la croupe et des jambes ainsi
qu'à son aspect d'ensemble fait de beauté
corporelle et d'équilibre. Mais l'aspect
purement extérieur et l'origine ne doivent pas
suffire à l'éleveur occidental. Chaque produit
de l'élevage doit faire preuve de cette santé
fondamentale qui est pour l'Arabe synonyme de
douceur, de sobriété, de zèle, d'endurance, de
perfection mécanique. Néanmoins un effort trop
unilatérale provoque une dégéneresence des
formes (comme chez beaucoup de chevaux de race).
...... On ne considère
pas suffisamment les différences biologiques et
morphologiques des sous-races et des types. C'est
ainsi qu'on a croisé à des pur-sang anglais aux
longues jambes et aux corps allongés des arabes
à tête courte, détail qui entraîne des formes
généralement plus ramassées et plus larges,
que ce soit les jambes, le dos, le cou et le
poitrail (le volume de ce dernier est égal à
celui du pur-sang anglais qui est bien pus
grand). On croit ainsi renouveler le sang
occidental, anglais ou autre, par une injection
de sang arabe, mais la déception est très
grande. On attribue cet échec au cheval arabe.
La plupart du temps l'étalon utilisé est
originaire de Syrie, de Palestine, de
Mésopotamie et même d'Afrique du Nord
(berbère). Il s'agit d'un oriental ou d'un
africain, et de rien d'autre.
...... Les Bédouins
d'Arabie eux-mêmes, qui devraient être mieux
renseignés puisqu'ils ont été créateurs des
différentes sous-races du pur-sang, ont
abandonné ou oublié que l'élevage a pour but
principal de conserver la pureté du type, et ils
se désavouent ainsi eux-mêmes. Il y eut un
temps où ils observaient fanatiquement cette
règle. Lorsqu'ils ne pouvaient pas se procurer
un étalon de la même sous-race que leurs
juments ils n'hésitaient pas à recourir à
l'inceste en faisant couvrir la mère par le fils
ou la fille par le père, et cela sans aucun
dommage pour la descendance. Chez beaucoup de
mammifères sauvages, la consanguinité est un
phénomène courant et les résultats sont bons
puisque les parents, grâce à la sélection
naturelle, ne transmettent que des qualités
favorables. Aussi les Bédouins ont-ils suivi
leur exemple, mais de nos jours la plupart
recourent au premier étalon venu. D'autres, un
peu plus prudents, écartent les étalons de
certains troncs raciaux et mélangent tous les
autres. Enfin il en est qui s'en tiennent à un
très petit nombre de sous-races bien définies.
Dans ce livre que j'ai déjà mentionné,
Mourchid al Nauouak dit: "au Nadjaz, nous
nous limitons à croiser entre eux d'abord les
Saqlaoui, puis les Kouhaylan, et en troisième
lieu les Chouwayman."
...... Il est évident
que la pureté de l'élevage est indispensable
pour obtenir la constance des qualités et pour
fixer un type précis d'animal. Dès 1898, le
professeur Dünkelberg disait dans son livre: "
L'élevage sélectif du cheval":
"Voilà pouquoi nous avons vu que partout
où prospère l'élevage des bêtes et où les
éleveurs suivent une voie bien définie d'avance
et tiennent consciencieusement des stud-books
ou livre de haras, les lignées ne portent jamais
le nom du père, mais celui de la mère : c'est
elle en effet qui est le point commun de la
lignée puisque ses rejetons proviennent de
pères différents. C'est donc bien la mère qui
constitue le lien unique et qui assure l'étroite
parenté de toute sa progéniture." Comme je
l'ai déjà fait remarquer, de nombreuses
variétés de chevaux arabes se ressemblent dans
leur structure et leurs caractéristiques, car
elles ne sont au fond que les ramifications d'un
tronc unique.¨Par exemple, les Dahman descendent
des Saqlaoui, et les Saqlaoui, comme tous les
arabes, proviennent du tronc primordial des
Kouhaylan.
...... En accouplant une
seule fois deux variétés très différentes, on
voit surgir des défauts bien plus apparents
qu'après un croisement qui se répète sur
plusieurs générations. En effet, le mélange de
deux types absolument distincts produit un
bâtard dépourvu de beauté et d'harmonie et qui
déçoit jusqu'aux amateurs les plus complaisants
du cheval arabe. Il est absurde de tenter
l'expérience sous prétexte que l'arabe manque
de quelque chose, ou qu'on désire au contraire
obtenir grâce à lui un produit amélioré.
C'est ce genre de déceptions qui fait jeter le
manche après la cognée, si bien qu'on voit des
amateurs de chevaux arabes se transformer en
leurs plus farouches adversaires.
...... Mais ceux qui ne
perdent ni confiance ni patience poursuivent
leurs tentatives, recourent à d'autres arabes de
race noble, et en moins d'une vingtaine d'années
ils surprennent le monde en lui présentant un
type de cheval qui suscite l'estime et la joie de
tous. Que s'est-il passé ? Mélangez deux
couleurs franches et vous obtiendrez une teinte
assez sale, mais mélangez les toutes et vous
verrez surgir la "couleur
fondamentale", le blanc. Ainsi le mélange
de nombreux types d'arabes aboutit finalement au
type de l'arabe primitif, le Kouhaylan, doué de
toutes les qualités disparues dans le premier
mélange. Quand un éleveur véritablement
sérieux veut fixer un type par union
consanguine, il doit être prudent dans ses
croisements : veut-il donner la prépondérance
à un type allongé, plus grand, il lui faut
mettre à part tous les spécimend trapus, plus
larges et par conséquent plus petits, qu'il
continuera à croiser entre eux en tant que type
distinct.
...... Nombreux sont
ceux qui considèrent que la taille réduite de
l'arabe est un défaut.
On ne peut avoir à la fois du sang arabe très
pur et une taille élevée. La seule manière
d'obtenir un animal assez grand qui garde malgré
tout les proportions du pur-sang arabe est
d'élever de grandes juments de forme assez
rectangulaire, même si elles s'éloignent
d'abord du pur-sang, puis de poursuivre les
croisements en utilisant uniquement des étalons
petits, du type le plus noble. Par exemple, les
Obayyan ont les membres, le cou et le torse
relativement longs, c'est-à-dire les formes du
cheval de course. L'étalon peut être petit, je
dirais qu'il doit l'être, car son rôle est d'améliorer
la race. Or, de grands étalons arabes ne sont jamais
des animaux de pure race, mais résultent d'un
mélange. Les éleveurs modernes de chevaux de
course redoutent de les utiliser et ils ont
raison, car ils font de mauvaises expériences
avec ceux dont ils se servent couramment; et en
effet ils n'ont presque jamais à leur
disposition un étalon qui soit vraiment un arabe
pur.
...... La grandeur de
l'étalon ne détermine pas la taille de sa
progéniture. C'est de la jument, et d'elle
seule, que les poulains héritent ce caractère.
Autrement on n'aurait jamais fait couvrir par le
même étalon des poneys gallois et des juments
Orloff.
...... Il y a un autre
point remarquable : l'habitude qu'ont les
Bédouins de pousser à l'extrême certaines
habitudes et tendances de leurs chevaux. Dans le
n°35, page 9, de la revue allemande Nos
chevaux, on peut lire cette phrase du
professeur Dünkelberg qui m'a frappé et dont
j'ai eu depuis la confirmation sous les formes
les plus différentes : "Du fait que de
bonnes juments lui donnent une excellente
progéniture, et que des juments passables lui
engendrent les poulains les plus mauvais qui
soient, il s'ensuit que l'étalon le plus noble
ne parvient pas à compenser les défauts les
plus accusés." La tare physique ou mentale
d'une jument non seulement demeure constante dans
sa descendance, mais l'intervention de l'étalon
arabe peut l'accroître. Cette exagération
des caractéristiques, tant avantageuses que
néfastes, prouve à quel point il est important
de n'employer que des éléments parfaits, sans
aucun défaut, que ce soit dans l'élevage des
arabes ou dans une expérience d'amélioration.
...... La seule
exception à cette règle est peut-être
l'apparition de certaines formes défectueuses
provoquées par une méthode d'élevage qui ne
tend qu'à une seule utilisation de l'animal,
comme chez les pur-sang anglais. On voit alors
apparaître des phénomènes évolutifs
qu'explique une sélection unilatérale :
maladies héréditaires des voies repiratoires et
de l'articulation du pied, etc. A mon avis, le
sang arabe pourrait supprimer ces faiblesses : il
suffit qu'un éleveur privé veuille s'y atteler
en acceptant de sacrifier un peu de vitesse au
bénéfice d'un renouveau de santé. Le pur-sang
anglais a quand même d'autres qualités que la
rapidité sur une courte distance. L'arabe de
sang noble, y compris le Mouniqi, jouit d'un
système respiratoire idéal avec un larynx et
une trachée énormes et souples; l'articulation
de son pied est puissante et pourtant fine. Il
transmet ces qualités, la preuve en est faite.
Même dans une course d'endurance, il n'éprouve
aucune difficulté de respiration; ses os, loin
d'être épais et spongieux, ont une densité
inégalable, et ses articulations se distinguent
par leur irrigation et un gonflement naturel,
robuste, fait de tendons et de muscles, qu'on lui
reproche parfois bien à tort.
...... On a pu suivre
en Angleterre les effets d'un seul apport de sang
arabe sur quinze générations, avant que des
adjonctions toujours répétées de sang
étranger aient finalement fait disparaître
toute caractéristique purement arabe.
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