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CARACTERES ZOOLOGIQUES - ORIGINES

DOMESTICATION

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par
André SANSON

par
Paul DECHAMBRE


  extraits du

TRAITE DE ZOOTECHNIE
, Tome II,
ZOOLOGIE ET ZOOTECHNIE GENERALES-LOIS NATURELLES ET METHODES ZOOTECHNIQUES,
troisième édition

André SANSON
Librairie Agricole de la
MAISON RUSTIQUE, PARIS, 1888

chapitre III: Lois de l'extension des races

p 64 : extrait de l'origine des espèces de Darwin :

" On a souvent répété oiseusement que toutes nos races de chiens ont été produites par le croisement de quelques formes originales; mais, par le croisement, on peut obtenir seulement des formes en quelques degrés intermédiaires entre leurs parents; et si nous avons recours à un pareil procédé pour expliquer l'origine de nos diverses races domestiques, il faut admettre alors l'existence préalable des formes les plus extrêmes, telles que le lévrier italien, le limier, le boule-dogue, etc., à l'état sauvage.
De plus, la possibilité de produire des races distinctes à l'aide de croisements a été beaucoup exagérée.
On connaît des faits nombreux montrant qu'une race peut être modifiée par des croisements accidentels, si on prend soin de choisir soigneusement les descendants qui présentent le caractère désiré;
mais qu'on puisse obtenir une race presque intermédiaire
entre deux autres très-différentes, j'ai peine à le croire.
Sir J.Sbright a fait des expériences expressément dirigées dans ce but, et n'a pu réussir. Les produits du premier croisement entre deux races pures sont en général uniformes et quelquefois parfaitement identiques, ainsi que je l'ai vu pour les pigeons. Les choses semblent encore assez simples jusque là; mais quand ces produits sont croisés à leur tour les uns avec les autres pendant plusieurs générations, rarement il se trouve deux sujets qui soient semblables, et c'est alors qu'apparaît l'extrême difficulté, ou plutôt l'entière impossibilité de la tâche.
Il est certain qu'une race intermédiaire entre deux formes très distinctes ne peut être obtenue que par des soins extrêmes et par une sélection longtemps continuée; encore ne saurais-je trouver un seul cas reconnu où une race permanente se soit formée de cette manière."

p 65 : Citation de de Broca : extraite de "Recherches sur l'hybridité",
dans "Journal de la physiologie de l'homme et des animaux", de Brown-Séquard, t.I, p.444 :

" On trouve aujourd'hui, sur les bords du Nil, une race indigène autrefois soumise à l'homme, maintenant libre et nomade, et à qui trente siècles de civilisation, suivis de mille ans de barbarie, n'ont fait subir aucun changement. Ces chiens, qu'on désigne vulgairement sous le nom indien de parias, sont tout à fait semblables à ceux dont les corps embaumés se retrouvent en grand nombre dans les plus anciens tombeaux de l'Egypte.
C'est leur image qui forme le signe unique et invariable du mot chien dans toutes les inscriptions hiéroglyphiques.
Ce type indigène n'était certainement pas le seul qui existât dans le pays de Ménès et de Sésostris.
On y connaissait aussi le lévrier, le chien de chasse et le basset, dont les formes si caractéristiques sont reproduites exactement sur des bas-reliefs et des peintures qui datent de quatre mille ans environ.
Je citerai en particulier les scènes figurées sur le tombeau de Roti, célèbre amateur de chasse, qui vivait sous la douzième dynastie, plus de deux mille ans avant notre ère. Sur les monuments plus anciens, on ne trouve guère que le chien hiéroglyphique, ce qui permet de supposer que les autres races étaient d'origine étrangère.
Il n'en est pas moins curieux de constater que le type du lévrier et celui du basset étaient alors si distincts, aussi bien caractérisés qu'ils le sont aujourd'hui, et que ces types ont persisté sans altération notable, depuis l'origine des temps historiques, sous les climats les plus divers et dans les conditions les plus changeantes.
Quant au mâtin proprement dit (canis laniarius) , il ne figure pas sur les monuments de l'Egypte, mais il ne laisse pas que d'avoir encore une généalogie assez respectable, car ses ancêtres avaient déjà des statues à Babylone et à Ninive plus de six cents ans avant Jésus-Christ.
M.Nott, dans son intéressant travail sur l'Histoire monumentale des chiens, a donné la gravure d'un magnifique bas-relief trouvé dans les ruines de Babylone et sculpté, au dire des archéologues orientalistes, sous le règne de Nabuchodonosor. On y voit un superbe mâtin, dont la forme et les proportions, la physionomie et les allures se retrouvent sans aucune modification, dans la race des mâtins actuels. Il ne s'agit pas ici d'une simple ressemblance, mais d'une identité complète, à tel point que ce dessin paraît calqué sur l'image photographique d'un de nos plus beaux chiens de garde."

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Ainsi, malgrè les croisements fortuits ou méthodiques qui ont produit un grand nombre de races secondaires et des variétés nuancées à l'infini, certains types de chiens, le basset, le lévrier, le mâtin, le chien de chasse, le chien d'Egypte, se sont perpétués sans changement depuis l'antiquité la plus reculée jusqu'à l'âge moderne. Quarante siècles au moins ont passé sur eux sans en altérer la pureté. ......"

André Sanson,
Professeur de Zoologie et Zootechnie à l'Ecole
d'Agriculture de Grignon et à l'Institut National Agronomique

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extrait de

LE CHIEN,
RACES-ELEVAGE-ALIMENTATION HYGIENE-UTILISATION,

Paul DECHAMBRE
Librairie Agricole de la MAISON RUSTIQUE, Librairie de l'Académie d'Agriculture, 26, rue Jacob, Paris (6e), 1921
Premiere partie, Les races canines

CHAPITRE PREMIER

CARACTERES ZOOLOGIQUES - ORIGINES

Les Chiens domestiques sont des Carnivores appartenant à la famille des Canidés, au genre Canis, à l'espèce

Canis familiaris

Les Canidés sont des coureurs digitigrades, à griffes non rétractiles, ayant le plus souvent 5 doigts aux membres antérieurs et 4 aux membres postérieurs.
Leur formule dentaire typique est 3/3 - 1/1 - 4/4- 3
ou 2/3, correspondant à la répartition suivante des diverses catégories de dents:

  à la mâchoire supérieure, de chaque côté, 3 incisives, 1 canine, 4 prémolaires et 3 arrière-molaires quelquefois 2;

à la mâchoire inférieure, 3 incisives, 1 canine, 4 prémolaires et 3 arrière-molaires

au total 44 ou 42 dents.

Les doigts et l'ergot du chien. -

Le chien possède normalement cinq doigts au membre antérieur et 4 au postérieur.
Le squelette du pied de derrière compte 4 métatarsiens parfaits et un rudimentaire, court et mince, qui est généralement le seul vestige du premier orteil; le pouce manque donc ordinairement.
Il peut cependant se développer et être représenté dans le squelette par un ou deux os phalangiens petits et libres placés à la suite du métatarsien rudimentaire qui vient d'être mentionné.
Il arrive même que ce doigt appelé ergot, devient double.
L'ergot du chien n'est donc pas autre chose que le pouce du pied de derrière.
Cornevin le considère comme une particularité non fixée; Pierre Mégnin le donne comme un doigt supplémentaire répondant au pouce postérieur et constate sa présence habituelle sur les chiens de berger, les chiens des anciennes races d'arrêt, les dogues de montagne et les sous-races qui en dérivent directement.
Le double ergot existe dans les races de chiens de berger français à poil long (Briard) et à poil court (Beauceron) où sa présence est constatée depuis fort longtemps à l'état de variation flottante.

La sélection spéciale dont ce caractère a été l'objet dans les races pécitées, a renforcé sa puissance héréditaire; aussi le double ergot jouit-il présentement d'une grande fidélité de tansmission.
Dans le pied du chien, les deux doigts du milieu sont égaux et les plus longs; tous les doigts portent des ongles allongés, assez obtus, non rétractiles.
La plante des pieds ou sole est garnie de tubercules revêtus d'une membrane épidermique à surface chagrinée recouvrant un tampon élastique.
Le tubercule qui se trouve à la base des doigts a trois lobes; à l'extrémité du doigt le tubercule est petit et elliptique;un tubercule analogue à ceux de la sole est situé en arrière et un peu au dessous de l'articulation du carpe.
Dans quelques races (Terre Neuve) les doigts sont réunis par une membrane représentant une sorte de palmature.

Les espèces du genre Canis ont presque toujours 42 dents soit 3.1.4.2/ 3.1.4.3; cependant que la troisième molaire inférieure est quelquefois très petite et même absente.

Ces espèces ont été réparties par
Huxley en deux groupes, les Alopécoïdes et les Thooïdes.
- Les Alopécoïdes comprennent les Canidés à tête relativement plate, sans dépression marquée entre le crâne et la face, de manière que le front se continue insensiblement avec le dessus du museau; leur pupille est souvent ovale ou en fente verticale et leur queue longue et touffue.
On y range le Renard commun ( Canis vulpes), les autres espèces de Renards, telles que le Renard mexicain, le Renard argenté, le Renard tricolore, le Renard de Nubie, le Renard d'Egypte, le Sabora ( C. famelicus), le Caama, ( C. Caama), le Fennec ( C. megalotis), l'Isatis ou Renad bleu ( C.lagopus).
- Les Thooïdes sont caractérisés par une séparation assez nette entre le front et le dessus du museau, de sorte que ces deux régions forment entre elles un angle plus ou moins accentué (cassure du nez), une pupille circulaire et une queue de longueur moyenne relativement peu touffue.
On y reconnaît plusieurs sections ou sous-genres :
1° Les
Cyons ou Dholes, de l'Asie orientale, qui n'ont d'ordinaire que 40 dents
2° les Thous ou Chacals sud-américains;
3°Les Chacals, chiens de petite taille répandus dans les régions chaudes de l'ancien continent, dont les plus connus sont le Chacal indien ( C. aureus) qui habite l'Inde, Ceylan, la Birmanie, le sud-ouest de l'Asie jusqu'au Caucase, l'Asie Mineure, la Turquie; le Chacal svelte ( C. anthus) ou Dhib des Arabes qui vit dans le nord de l'Afrique, en Egypte et en Abyssinie;
4° Les Loups
, dont le type est fourni par le Loup vulgaire ( C. lupus);
Les Chiens vrais, comprenant de nombreux types rangés dans l'espèce Canis familiaris, à laquelle on rapporte le Dingo d'Australie (Canis familiaris dingo ou C. dingo de quelques zoologistes).

La comparaison des caractères zoologiques des principales espèces du genre Canis montre que le Loup, le Chacal, le Cyon (ou Cuon) et le Chien sont plus voisins les uns des autres qu'ils ne le sont du Renard.
Par quelques-unes de ses races, le Chien se rapproche du Loup; par d'autres, il se rapproche du Chacal; tandis que toutes sont beaucoup plus éloignées du Renard.
L'examen des résultats des accouplements entre toutes ces espèces (Loups, Chacals, Renards et Chiens) aboutit à des conclusions générales du même ordre;


La chienne peut être fécondée par le loup sans difficulté, ou inversement la louve par le chien, bien que le fait soit plus rare.
Aristote et Pline l'avaient déjà relaté; les expériences du marquis de Beaufort (1773), de Buffon, de Cuvier, de Flourens, de Khüne, ne laissent aucun doute à ce sujet.
Les constatations scientifiques corroborent diverses observations faites par des propriétaires de chiennes habitant des régions boisées et qui ont remarqué des accouplements spontanés de ces femelles avec des loups. On doit également retenir pour très important le fait que les produits de ces unions peuvent être féconds et se comporter non pas comme des hybrides, mais comme des métis.
L'union du Chien et du Chacal se fait sans grande difficulté. Flourens et Khüne l'ont réalisée et ont constaté la fécondité des métis obtenus.
Entre le Chien et le Renard, l'accouplement est beaucoup plus rare et plus difficile qu'entre les espèces précédentes. Cornevin assure que pour avoir chance de réussir, il faudrait mettre en présence le renard et la chienne en chaleur et non pas le chien et la renarde.

Tous ces faits montrent la proche parenté du Chien, du Loup et du Chacal, et la distance plus grande qui les sépare du Renard.
En outre, puisque ces espèces ont pu s'unir spontanément et fructueusement, on peut penser que quelques races de chiens dérivent de ces unions, tandis que la difficulté de l'hybridation avec le Renard écarte toute idée de communauté d'origine avec cette espèce.

Origine des races canines

Les races de chiens sont extrêmement nombreuses et présentent des variations très accentuées dans leurs caractères distinctifs.
Ce nombre et ces divergences peuvent s'expliquer par la
tendance naturelle de l'espèce canine à la variation, renforcée par l'effet d'une domestication très ancienne et de l'intervention de l'homme dans la multiplication, en vue de la fixation des caractères pouvant présenter pour lui un intérêt quelconque d'utilité, de sport ou de simple curiosité.

On a toutefois quelque tendance à faire intervenir aussi la multiplicité des souches.

Darwin
s'est montré partisan de cette idée, en se basant sur la difficulté que l'on éprouve à croiser quelques chiens de l'Amérique du Sud avec des chiens européens.
Enfin, on a vu dans le Loup et le Chacal, très voisins des Chiens par leurs caractères morphologiques et physiologiques, les souches respectives de plusieurs races canines.

La question est donc complexe et assez confuse.
L'opinion qui tend à dominer aujourd'hui est celle de la pluralité des souches, sans que l'on puisse déterminer avec précision la part qui revient à telle ou telle espèce

Domestication du chien et races canines primitives

Quelques auteurs font remonter la domestication du chien à l'époque du Mammouth
voir eporedo/préhistoire ; mais on s'accorde généralement pour la placer au début de l'âge de la pierre polie (période néolithique).

Si on excepte le Renne, pour lequel des doutes sont d'ailleurs émis, il faut admettre que le chien est le premier animal que l'homme ait soumis à la domination et conservé auprès de lui.

Or, dès cette période reculée existaient déjà des formes canines différentes les unes des autres.

Parmi les crânes assez nombreux et bien conservés qui ont été trouvés dans des tourbières ou dans des restes d'habitations lacustres, on a reconnu des types distincts constituant autant de races primitives, ancêtres des races actuelles.

La race la plus anciennement décrite et qui paraît devoir être considérée comme la première domestiquée, est le
chien des tourbières (Canis familiaris palustris) découvert dans des stations lacustres de la période de la pierre polie et déterminé par Rütimeyer en 1862.
C'est à ce type que se rattachent les crânes que nous avons recueillis dans les habitations lacustres du lac de Clairveaux et décrits en 1908.

On y constate cependant quelques modifications montrant la tendance très nette du type à la variation.

D'autres crânes ont été trouvés, remontant à l'âge du bronze, par conséquent moins anciens que les précédents; on en a fait des formes distinctes:

 

Canis familiaris matris optimae, beaucoup plus grand que le chien des tourbières et atteignant la taille d'un chien de berger;
Canis familiaris intermedius, découvert dans des stations de la Basse-Autriche et qui aurait donné naissance au chien de berger, tandis que le
Canis fam. Spaletti, plus petit que le C. f. palustris serait l'ancêtre des races telles que celle du Loulou.

M.
Ed.Hue a déterminé trois types, y compris le C. f. palustris, dans les ossements des stations lacustres du Jura français.

L'un de ces types lui paraît l'ancêtre du chien de berger, l'autre ressemblerait à un chien de chasse de petite taille.

D'après Hue, la succession de ces types primitifs semble avoir eu lieu dans l'ordre suivant:
- ...Début de la pierre polie: C. f. palustris.
- ...Fin de la pierre polie ou début du bronze : Canis f. Spaletti
- ...Age du bronze : Canis f. matris optimae
-... Age du fer: Canis f. intermedius

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En résumé, les traces les plus anciennes de la domestication du chien en Europe centrale et occidentale apparaissent au début de l'âge de la pierre polie, et dès cette période nous constatons l'existence de plusieurs races distinctes primitives, autochtones, formées par évolution naturelle et peut-être aussi par la sélection de l'homme, auxquelles il convient de faire remonter, à travers les siècles, l'origine des nombreuses races actuelles.

Dans la suite des temps celles-ci se sont constituées par l'action des causes générales qui ont agi sur toutes les espèces domestiques:

  variation et sélection,
croisements et métissages,
fixation d'anomalies ou de monstruosités héréditaires (bouledogues, bassets),
influence du régime et de l'adaptation à des exigences déterminées par entraînement et dressage.

Ces causes, aussi complexes que puissantes, expliquent la multiplicité des caractères offerts par les races canines ainsi que celle des hypothèses émises pour interpréter la filiation.

[....]

Paul Dechambre
Professeur à l'Ecole Nationale
d'Agriculture de Grignon
et à l'Ecole Vétérinaire d'Alfort
Membre de l'Académie d'Agriculture
Membre du Comité de direction du
club Français du chien de berge
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