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LES RACES
CHEVALINES ASIATIQUES ET EUROPEENNES EN OCCIDENT (chap.XI)
On a vu [...] les hommes
quaternaires de l'Europe occidentale mangeant
aussi bien le cheval sauvage que les autres
animaux.
Tout incomplets qu'ils
soient, les documents que l'on possède déjà
sur les autres peuples de l'Ancien Continent,
leurs contemporains, permettent d'inférer que
ces derniers étaient également hippophages à l'époque
quaternaire, que la chair des Equidés propres à
leurs pays entrait aussi dans leur alimentation.
Cette conclusion est surtout autorisée par
certains faits qui ont été exposés plus haut
et qu'il importe de rappeler. L'hippophagie a
persisté dans l'Europe occidentale pendant l'âge
néolithique, après l'arrivée du peuple des
dolmens venu de l'Orient (chap. II, §5).
Le cheval est l'un des animaux que les Proto-Mongols
ont domestiqués pour s'en nourrir [..].
L'Avesta montre les Aryas mangeant le
cheval avant d'être devenus agriculteurs [..].
Le Véda nous apprend que les Hindous
mangeaient le cheval dès l'aurore de leurs temps
historiques [..].
Enfin, on a vu dans plusieurs des chapitres
précédents que l'hippophagie a longtemps
persisté et persiste même encore dans un grand
nombre de peuples.
Ajoutons que, dans les terramares de l'âge du
bronze du Modénais, les ossements de chevaux
"sont
habituellement brisés comme ceux des
boeufs et autres animaux ayant servi de
nourriture, ce qui prouve qu'on mangeait
aussi le cheval" (Giovanni
Canestrini, Objets trouvés dans les
terramares du Modénais, dans les Matériaux
pour l'histoire de l'homme, année
1866, p. 422) |
[....]
L'ensemble de ces considérations suffirait à
lui seul pour prouver que le cheval, de tout
temps recherché pour sa chair et tout aussi
sociable que les autres animaux domestiques, a
été réduit en domesticité en même temps que
ces derniers, sur divers points du globe où, [.],
l'accroissement des populations humaines et la
diminution du gibier déterminèrent les peuples
les mieux doués à élever des troupeaux pour
combler le vide laissé par des chasses devenues
insuffisantes.
Aussi le cheval est-il l'un des animaux
qui furent amenés en Occident par le peuple des
dolmens, comme l'admettent généralement les
archéologues; et les chevaux importés par ce
peuple disputèrent dès lors le sol de nos pays
aux races chevalines indigènes qui ne tardèrent
pas à être assujetties, [..].
Si le petit nombre d'animaux domestiques amenés
par le peuple des dolmens explique pourquoi
certaines races animales, notamment les races
chevalines européennes, ont été alors
réduites en domesticité, il rend également
compte de la prédominance des débris d'animaux
sauvages sur ceux des animaux domestiques, qui a
été constatée dans les gisements néolithiques
de l'Occident, tandis qu'on y observe le
contraire à l'âge du bronze.
Ainsi, par exemple, sir John Lubbok montre par
des chiffres que le cheval était très rare en
Angleterre pendant l'âge de la pierre polie.
" A une
époque plus rapprochée, le cheval et le
taureau semblent avoir été sacrifiés
sur les tombeaux et faisaient
probablement partie du festin des
funérailles...
La présence fréquente d'ossements d'animaux
dans les tumuli semble montrer qu'on
faisait ordinairement des festins des
funérailles en l'honneur des morts, et
les cas nombreux où se retrouvent des
ossements humains calcinés tendent à
prouver que des coutumes encore plus
horribles prévalaient et qu'on ne se
contentait pas de sacrifier des chevaux
et des chiens, mais qu'on sacrifiait
aussi des esclaves sur les tombeaux de
leurs maîtres.
A une époque récente, en 1781, le
cheval de Frédéric-Casimir fut immolé
sur le corps de son maïtte et déposé
avec lui dans le tombeau. " (Lubbok, L'homme
avant l'histoire, p. 119- 120)
|
Piétrement 1882
|
haut
.
bâton perforé sculpté de chevaux
(Musée des antiquités nat. St Germain en Laye)
|
Mais c'est surtout dans
les cités lacustres de la Suisse qu'on a pu
constater que, depuis le commencement de l'âge
de la pierre polie jusqu'à la fin de l'âge du
bronze, les produits de la chasse ont de moins en
moins contribué à l'alimentation de l'homme et
que les produits agricoles ont augmenté dans la
même proportion.
On a vu aux pages 121 et 122 combien les
ossements de chevaux étaient rares dans les
stations lacustres néolithiques, et l'on sait
combien ils étaient nombreux dans les stations
de l'âge du bronze (On sait par Hérodote (V, 16)
que de son temps les Péoniens des cités
lacustres du lac Prasiq possédaient également
des chevaux qu'ils nourrissaient de poissons)
.
Aussi, parmi ces derniers, nous occuperons-nous
uniquement des crânes, parce qu'ils indiquent à
quelle race appartenaient les chevaux des
habitants lacustres de cet âge.
M. le professeur Théophile Studer, conservateur
de la collection zoologique du Musée de Berne, a
d'ailleurs eu l'obligeance de nous donner de
précieux renseignements sur ce sujet, dans deux
lettres datées du 29 janvier et du 7 février
1881.
Voici, d'après M. Studer,
la liste des crânes de chevaux de l'âge du
bronze conservés au Musée de Berne, avec l'indication
des localités où ils ont été trouvés:
1° Crâne entier,
avec la mandibule. ( Trouvé à 6 pieds
de profondeur dans l'île de Saint Pierre
du lac de Bienne: alluvion du lac.)
2° Crâne entier, moins les sus-naseaux.
(Canal de la Tielle, près de Schwadernau,
auprès de Bienne.)
3° Crâne auquel il manque le
maxillairre droit et une partie de la
voûte du palais. ( Trouvé dans un fond
de tourbe, sous une ancienne voie romaine,
près du canal de Tielle, auprès de
Brügg.)
4° Crâne auquel il manque l'arcade
zygomatique droite et une partie du
maxillaire. (lac de Bienne, près de
Ligerz.)
5° Crâne auquel il manque l'inter-maxillaire,
les |
sus-naseaux et la
partie antérieure des frontaux. (Lac de
Bienne, près de Ligerz.)
6° Crâne auquel il manque l'arcade
zygomatique gauche et une partie du
frontal gauche. Trouvé à huit pieds de
profondeur dans le vase de la tranchée
des Hageneck, près du lac de Bienne.)
7° Crâne entier trouvé dans le lac de
Bienne, près de Locraz (Lüscherz).
8° Crâne auquel manquent, les sus-naseaux,
l'inter-maxillaire et la partie
antérieure des frontaux; trouvé dans la
station lacustre d'Auvernier (lac de
Neufchâtel); de la collection du docteur
Gross. |
La plupart de ces crânes
ont été découverts quand on a redressé et
canalisé la rivière de la Tielle pour faciliter
l'écoulement des eaux du lac de Bienne dans l'Aar.
L'exécution du canal a fait baisser les eaux du
lac de 9 pieds et toutes les stations lacustres
ont été mises à sec. On a pu les explorer à
découvert; et on a constaté que celles de l'âge
du bronze ont fourni des ossements de chevaux
ainsi que des mors en bronze et en corne.
Les mors en bronze des cités lacustres de la
Suisse ne sont pas les seuls du même âge que l'on
connaisse; on en a trouvé beaucoup d'autres dans
de très anciennes sépultures, notamment en
Italie, en France, en Allemagne et en Russie.
Ce sont des témoignages irrécusables de l'utilisation
du cheval comme moteur à l'âge du
bronze, tandis qu'on n'a encore
découvert aucun mors de l'âge néolithique.
Certains auteurs en ont inféré que le cheval
est resté un animal domestique exclusivement
alimentaire à l'époque néolithique, qu'il n'a
été utilisé comme moteur qu'à partir de l'âge
du bronze. D'autre part, dans un article
intitulé Hypothèse sur les
bois de renne et de cerf travaillés, dits
bâtons de commandement (Voyez Matériaux pour l'histoire
de l'homme, t. XIII, 1877, p 53-55),
M. Pigorini admet
que ces derniers objets trouvés en Europe, même
ceux qui remontent à l'âge du renne, peuvent
avoir servi, après avoir été liés par couples,
à former des chevêtres semblables à ceux dont
les paysans de la Sardaigne se servent encore
aujourd'hui pour conduire les chevaux attelés ou
montés: ce qui reporterait à l'âge du renne l'utilisation
du cheval comme moteur.
L'hypothèse de M.
Pigorini est inadmissible, puisqu'on a vu dans le
chapitre II, §2, que les populations
européennes de l'âge du renne ne possédaient
pas de chevaux domestiques.
L'opinion de ceux qui nient l'utilisation du
cheval comme moteur à l'époque néolithique n'est
pas mieux fondée;
car, si l'on n'a pas encore découvert de mors
datant de cette époque, cela
peut tenir uniquement à ce que les mors étaient
alors en bois, puisque tels étaient à l'origine
ceux des Grecs,[..].
Le mors n'est d'ailleurs pas indispensable pour
diriger les divers animaux domestiques, même les
chevaux qui, dans une foule de circonstances et
malgré l'antiquité de l'usage du mors, sont
partout encore conduits avec des chevêtres, des
caveçons, des muserolles, des licols, etc.
On a même vu que, jusqu'à l'époque d'Alexandre,
les Hindous conduisaient encore leurs chevaux
uniquement avec des caveçons (L'objet dont le
richi Bharadwâdja parle plus haut, dans son
hymne A Indra, et que le traducteur
appelle un frein, était par conséquent un
caveçon et non un mors. Nous avons négligé, à
la page 226, de faire cette remarque, inutile
pour les lecteurs attentifs; mais il peut y en
avoir d'autres à qui elle soit utile.); et l'on
verra dans le chapitre suivant que, jusqu'à l'époque
de la conquête romaine, les Numides guidaient
leurs chevaux soit avec une baguette, soit avec
une simple corde qui leur tenait lieu de mors.
L'absence de mors dans les stations de l'époque
néolithique explorées jusqu'à ce jour n'infirme
donc pas le moins du monde la preuve de l'utilisation
du cheval comme moteur à cette époque, et cette
preuve est fournie par l'état agricole des
hommes néolithiques.
Toute population agricole utilise en
effet, soit pour un service, soit pour un autre,
ceux de ses animaux qui sont propres à ces
genres de service; or [..] les populations
néolithiques ont possédé le cheval, et il est
tout aussi facile à utiliser comme moteur que
les autre animaux domestiques.
Piétrement 1882
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haut
.
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Les huit crânes lacustres
ci-dessus mentionnés appartiennent
incontestablement à l'âge du bronze; les
renseignements que M. Studer nous donne dans ses
lettres ne permettent pas d'en douter.
M. Studer nous apprend aussi que les crânes n°
1, 2 et 4 sont ceux dont les moulages existent au
musée de Saint-Germain. Nous avons vu ces trois
crânes dans ce musée, avec
M. André Sanson, qui leur a
consacré dans le Revue
archéologique, t. XXXIII, 1877, pages 190-192,
une note qu'il termine ainsi:
" Nous n'avons
pas la moindre hésitation à conclure
que les trois Equidés dont les restes
ont été trouvés au fond du lac de
Bienne étaient des chevaux asiatiques du
type le plus pur; " |
et l'on sait que les
chevaux asiatiques de M. Sanson sont
ceux que nous appelons aryens.
La conclusion de M. Sanson peut d'ailleurs s'appliquer
à tous les huit crânes précités; car M.
Studer nous dit dans sa lettre
du 7 février 1881:
" Ils
appartiennent tous à la même race, qui
doit être votre cheval aryen.
Le profil est droit, rectiligne, le front
large et plat; nul n'excède 480
millimètres.
Je possède le crâne du cheval égyptien
qui a presque la même longueur, 500
millimètres, et qui me semble
représenter assez bien votre type
mongolique;
son front est légèrement bombé en
ligne antéro-postérieure et frontale;
les arcades sourcilières ne sont pas
saillantes." |
Quoique la taille ne
puisse fournir que des indications très
secondaires, nous ferons observer que les tibias
dont le musée de Saint-Germain possède des
moulages et qui ont la même provenance que les
trois crânes précités appartenaient à trois
chevaux ayant eu environ 1m,48, 1m,40 et 1m,20,
suivant M. Sanson: ce qui concorde du reste avec
les mensurations d'autres ossements de chevaux
lacustres de l'âge du bronze que M. Studer nous
a donné et que nous sommes forcé de passer sous
silence, faute d'espace.
Enfin M. Studer
dit, dans sa lettre du 7 février 1881, qu'il a
vu dans la collection du docteur Uhlmann, à
Münchenbuchsee, deux crânes de l'âge du bronze
se rapportant aussi à la même race chevaline
lacustre:
" 1° un
crâne entier trouvé dans la tourbe de
Moosseedorf, en dehors de la sation
lacustre du même lieu qui appartient à
l'époque de la pierre polie;
2° le crâne trouvé dans la station
lacustre du lac de Starnberg (époque du
bronze), décrit et figuré par Naumann
dans Archiv
für Anthropologie, 1874. " |
Quant au crâne de la
collection de Strasbourg, trouvé dans une
tourbière, M. Studer l'a vu seulement par la
vitrine, et il n'ose pas décider s'il appartient
à la même race.
Mais les dix autres crânes précités suffisent
pour montrer combien est erronée l'hypothèse
des auteurs qui ont fait remonter seulement aux
invasions des Sarrasins, ou même à l'époque
des croisades, l'arrivée des chevaux orientaux
dans l'Europe occidentale.
Piétrement 1882
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~
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Ces dix crânes nous
paraissent attester que la race chevaline
aryenne a été introduite dans cette région par
le peuple des dolmens, importateur de l'usage de
la pierre polie en Occident.
Notre opinion s'accorde avec celle des auteurs
suisses, Keller, Gross, Vogt, Studer, etc., qui
admettent qu'une même race humaine, encore
subsistante en Suisse, a persisté pendant toute
la période des habitations lacustres, y compris
l'âge néolithique.
Cette antiquité de l'arrivée de la race
chevaline aryenne en Occident peut seule
expliquer pourquoi elle y occupe, à l'exclusion
des races chevalines indigènes, tant de
contrées qui ont été signalées à la page 15;
car, si cette race exotique n'y était venue qu'après
la domestication des races indigènes, il lui
eût été impossible de les expulser d'une si
grande partie des régions occidentales.Il
faut donc admettre qu'elle a seulement envahi les
régions qui étaient alors dépourvues de races
chevalines indigènes;
et c'est ce qui nous porte à croire que les
descendants des chevaux sauvages mangés au sud
de la Loire par les hommes quaternaires avaient
remonté vers le nord en même temps que le renne,
comme nous l'avons dit .
Les hommes des dolmens sont donc pour
nous un peuple aryen, importateur dans
nos pays des premiers rudiments de la civisation
aryenne. Ils ont été, vraisemblablement à de
nombreuses reprises, les précurseurs des peuples
aryens importateurs du bronze, auxquels ils ont
ouvert les chemins de l'Occident; de même que
les immigrants européens du XVe et du XVIe
siècle ont été les précurseurs en Amérique
des immigrants du XIXe siècle et des autres
immigrants qui ne cesseront pas d'y arriver
pendant bien des siècles encore.
Les chevaux aryens, venus chez nous avec le
peuple des dolmens, ont vu par conséquent, dans
le cours des siècles, leur population se
renforcer par l'arrivée de nouveaux contingents,
lors de nombreuses migrations des peuples aryens
qui ont pénétré en Occident avec leurs armes
de bronze, puis de fer, aussi bien à travers l'Europe
centrale que par la vallée du Danube et sur les
flots de la Méditerranée; et l'on a vu que les
Oenotriens et les Peucétiens sont arrivés en
Italie dès le XIXe siècle avant Jésus-Christ.
L'antériorité des migrations aryennes du rameau
celtique est d'ailleurs généralement admise, à
cause de l'archaïsme de dialectes celtiques
comparés aux anciens dialectes aryens d'Asie;
et l'on sait d'autre part que le grand courant
des migrations aryennes qui se sont faites d'Asie
Mineure et de Grèce en Occident a seulement
été ralenti à l'époque de la puissance
romaine, pour reprendre à l'époque byzantine.
Piétrement 1882
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